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Puy-de-Dôme : une bio bien élevée

Puy-de-Dôme : une bio bien élevée

À partir du 31/05/2022

Direction le Puy-de-Dôme ! Là-bas, l'agriculture bio se développe, sans excès de vitesse, en cohérence et pour répondre aux besoins de la région. Découvrez notre reportage !

Sont-ce les volcans endormis dominant le département qui, tels des méditants, lui donnent le goût de la réflexion ? Il y a près de 15 ans déjà, se tenait ici un colloque (on y était) sur changement climatique et agriculture biologique, alors que celle-ci était encore assez confidentielle dans la région.

Depuis, elle suit sa route, sans excès de vitesse mais en cherchant à être cohérente, voire performante, et à répondre peu à peu aux besoins.

 

Vignette Actu - Puy-de-Dôme : une bio bien élevée

Olivier et Julien Laurençon, éleveurs de cochons bio à Davayat, dans les Combrailles. C’est dans cette région que la bio du département aurait pris racines…

C’est le moment de manger du fromage fraîchement produit. « Auprintemps, le lait est gras, jaune,plein de nutriments », affirme Arnaud Reine, éleveur et fabricant de fromages bio à Perpezat, à 45 minutes au sud-ouest de Clermont-Ferrand.

Les prairies naturelles (non semées) aux espèces végétales variées et fleuries impactent la composition du lait. Les 50 vaches du Gaec* du Verseau y paissent d’avril à novembre, dans l’auguste panorama de la chaîne des Puys (80 volcans !). À la mi-février, lors de notre visite, pas de vaches dehors : à 1 000 m d’altitude, elles restent tout l’hiver au chaud à la ferme où il y a toujours à manger.

Pas de volcans non plus, disparus sous la pluie dans un ciel aussi sombre que les toits en ardoise alentour. Pas la moindre éclaircie qui aurait laissé deviner le vieux puy de Dôme (11 000 ans) qui donne son nom au département.

Tant pis pour les belles photos qu’on aurait aimé faire. Heureusement, il y en a une qui ne faisait pas grise mine : l’agriculture biologique locale. Certes, pas franchement éruptive, mais réfléchie, imaginative, réveillée.

* Groupement agricole d’exploitation en commun.

Photo d'illustration - Surface agricole bio du Puy-de-Dôme

 

AH LES COCHONS !

Entre 80 % du territoire en zone de montagne, avec surtout de l’élevage de bovins pour la viande et le lait vendus en circuits longs, et la plaine de la Limagne dans l’axe Riom-Clermont-Issoire, fief d’une puissante coopérative conventionnelle spécialisée dans les semences, la bio puydômoise se fraye un chemin en inventant ses outils.

Telle la boucherie-charcuterie Côte à Côte à Davayat, au nord de Riom, certifiée depuis fin 2021, en même temps que les deux Gaec qui l’ont créée pour garantir une viande à la qualité maîtrisée du champ à l’assiette. Olivier Laurençon y met toutes ses tripes, comme il le fait avec son petit élevage de porcs pensé dans le moindre détail.

Il a rapporté d’Autriche des solutions pour améliorer leur bien-être : accès à l’extérieur permanent, espacesséparés pour la gestation et les naissances, pour manger et dormir, pour l’abreuvement et les déjections… Les truies mettent bas en liberté.

« C’est une super surveillance quotidienne, confie l’éleveur, mais tous les matins, je suis content d’aller voir mes cochons. »

La mise en œuvre a été difficile et le moral, parfois en berne. Mais il fallait y croire parce que du porc bio local, il n’y en a pas tant que ça, leur rappelaient leurs soutiens dont Jérôme Bafoil du magasin Biocoop de Riom. « Il a même parlé de nous au banquier ! »

Photo d'illustration - Arnaud Reine

Arnaud Reine a également créé sa fromagerie.

Ce qui lui a permis de s’installer en 2009 avec un autre éleveur déjà en place sans avoir à racheter des terres et ni grossir le troupeau pour se dégager un revenu. Malin !

Ces ateliers de transformation diversifient l’offre bio, très basique il y a 10 ans lorsque Thierry Laplanche a ouvert le premier magasin Biocoop du département, à Cournon d’Auvergne :

« La bio, c’était nouveau. Les pionniers ne connaissaient pas Biocoop, ils étaient méfiants. Puis ils ont senti qu’il y avait un nouveau débouché. Depuis, on a plus de choix… ».

COOPÉRATION AUX PETITS OIGNONS

Côté légumes, la bio se développe sous des formes variées, du maraîchage diversifié sur une petite surface à la grande ferme avec juste quelques légumes sur plusieurs hectares.

Photo d'illustration - Tristan Mouchard

Tristan Mouchard est entre les deux, avec 2 hectares et une dizaine de légumes. Il préfère « ne pas en faire plus pour mieux les réussir ».

Il est à Loubeyrat, un pays d’élevage où il veut montrer qu’on peut y faire autre chose. « Les veaux exportés vers l’Italie, la Turquie, j’ai un peu de mal… », lance-t-il. Il participe à l’approvisionnement de six magasins Biocoop via Auvabio, une association créée par huit maraîchers puydômois souhaitant mutualiser leur travail (vente, livraison…) afin d’être plus cohérents et efficaces pour, en plus de la vente directe, répondre à la demande de la distribution et de la restauration collective régionales.

Auvabio fédère aujourd’hui 50 producteurs dans plusieurs départements auvergnats. « La commercialisation est un outil de développement et de structuration de la filière, non l’inverse, insiste Coralie Pireyre, sa directrice du développement coopératif. Il fallait occuper la place avant qu’un opérateur moins éthique prenne ce marché de demi-gros. »

Auvabio espère pouvoir être labellisée en commerce équitable. En attendant, ses adhérents doivent respecter une charte de valeurs.

« Les producteurs du département sont engagés et solidaires, conclut Solenn Brioude de l’association Bio 63. Toujours partants pour avancer ensemble. »

Photo d'illustration - Julien et Olivier Laurençon

JULIEN ET OLIVIER LAURENÇON

Éleveurs de porcs, Gaec du Paloux à Davayat

Ce sont les héritiers de Pierrot cochon. C’était le surnom dans le village du grand-père de Julien (à gauche sur la photo) et d’Olivier (au centre), l’arrière-grand-père d’Aloïs (à droite).

Ici, du cochon, il y en a toujours eu. En bio, c’est nouveau« J’avais peur de m’y mettre », avoue Olivier, pourtant consommateur sous l’impulsion de la mère, Paule.

Mais Julien raconte : « Quand je devais traiter les céréales, j’en étais malade deux jours avant. » Ils se lancent en 2019, développant les bonnes pratiques déjà adoptées (charcuterie sans sels nitrités, bien-être animal…). 

« Le bouleversement a été surtout dans les champs », affirme Julien, alors que son frère trouve que la mise-bas des truies en liberté, l’alimentation des porcs ont aussi été de gros changements. Les deux sont d’accord sur le fait qu’ils se sentent maintenant « plus patron » chez eux.

Les cochons apprécient aussi : le petit élevage (40 truies) est étonnamment calme, les « mamans », curieuses, ne sont pas craintives. Les animaux évoluent dans 3 bâtiments différents selon leur âge, vont et viennent en poussant du groin des petites portes, se prélassent dehors ou dorment dans la paille.

La prochaine étape, c’est la production de l’alimentation animale sur la ferme, parce que l’acheter « c’est économiquement et écologiquement aberrant », pour Julien qui, après avoir eu d’autres expériences professionnelles, confie avoir trouvé son bonheur à la ferme.

Denis, le père retraité, n’est jamais loin. Aloïs, 12 ans, pense déjà que « le cochon est l’animal le plus intelligent du monde ». Paule dit considérer le couple (Damien et Patricia) qui, à deux pas, découpe et commercialise le porc sous la marque Côte à Côte, comme ses enfants…

Face au stress lié à une activité finalement encore jeune, l’esprit de famille, la tendresse des uns envers les autres qui filtre, la fierté du travail déjà accompli et l’humour sont autant de pansements efficaces.

Retrouvez cet article dans le n°123 de CULTURESBIO, le magazine de Biocoop, distribué gratuitement dans les magasins du réseau, dans la limite des stocks disponibles, ou à télécharger sur le site de Biocoop.

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